Marthe HANAU, la banquière des années folles
Marthe HANAU naît le 1er janvier 1886 dans le 11e arrondissement de Paris. Ses parents sont de petits commerçants originaires d'Alsace et appartiennent à la communauté juive qui a choisi de rester française après la guerre de 1870.
Dès l’adolescence, la jeune Marthe entre en conflit avec une mère très autoritaire. Cette dernière s'oppose à ce que sa fille suive des cours de piano. Marthe provoque sa mère en fumant en public, en refusant de porter des tenues féminines à la mode, en conduisant des voitures de sport ou en s'affichant avec d'autres femmes.
Marthe finit par accepter un mariage arrangé avec l'héritier d'un industriel lillois à condition qu'on ne lui impose pas d'avoir une descendance. Elle se marie en 1906 à un homme d'affaires, Lazare Bloch, originaire de Lille. Mariée, elle a une liaison durable avec la fille d'un bijoutier, liaison qui, malgré une interruption provoquée par la Première Guerre mondiale, perdurera jusqu'à la fin de la vie de Marthe.
Caricature du couple Hanau/Bloch
A 31 ans en 1917, elle et Lazare Bloch tentent de lancer plusieurs affaires qui échouent. Lazare n'est pas doué. Il a l'idée de commercialiser un café de synthèse sous la forme d'une poudre à diluer, un ersatz comme il en existait en cette période de pénurie. Appelé le « Bâton du soldat », il est vendu à grand renfort de publicité, laquelle sera jugée mensongère : le produit en question, à défaut de stimuler les poilus, les endormaient. L'Armée française porte plainte. Ils sont tous deux condamnés par un tribunal correctionnel, Marthe bénéficiant d'un sursis. Pour ménager sa réputation dans le milieu de la finance, elle divorce de son mari, trop compromis, le 4 mai 1920.
Bien que séparés officiellement, Lazare resta à ses côtés pour les affaires. Et quelles affaires !! Elle ouvre une usine de parfumerie et une de textile. En 1925, elle s'intéresse à la bourse et s'offre une feuille boursière " La Gazette du Franc" .
Toujours entourée par son ex mari et son amant Pierre AUDIBERT, elle réussit à ce que sa gazette devienne un incontournable dans les hautes sphères des boursicoteurs, certaines des valeurs évoluant suivant ses recommandations de ventes ou d'achats.
C'est là que son surnom de "La Banquière" prit tout son sens. Bien sûre qui dit réussite dit débarquement de profiteurs. Tout ce que la France connaissait en industriels, financiers et bien sûr hommes politiques tournaient autour d'elle.
Elle prit donc un peu la grosse tête et commença à spéculer. Un système très simple à la Madoff : On finance les fortes rémunérations des actionnaires par l'argent des nouvelles souscriptions.
Mais dès qu'on est sous les feux des projecteurs, la jalousie et la convoitise arrivent ce qui commence à inquiéter les banques et les politiques.
Tout s'écroule fin 1928, "la banquière sans scrupules" fut arrêtée sous l'inculpation d'infraction à la loi des sociétés, d'escroquerie et d'actions illicites sur les marchés financiers. Sa clientèle prise de panique exigea d'être remboursée et malgré tout elle réussi a assumer à hauteur de 40%.
Bien sûr à cette époque la presse d'extrême droite en fit ses choux gras. La "juive alsacienne" fut le symbole de la corruption et ils tentent d'éclabousser les politiques comme Aristide BRIANT ou Philipe HENRIOT qui l'avaient soutenue à un moment.
Le 28 mars 1931, Marthe Hanau est condamnée pour escroquerie et abus de confiance à deux ans de prison avec sursis et 3 000 francs d'amende ; Lazare Bloch est condamné à 18 mois de prison.
Trois jours plus tard, Pierre Audibert, également condamné, meurt d'une congestion.
Le 7 juillet, elle est victime d'un accident de la route. Immobilisée des jambes, elle subit une opération, qui l'oblige à se déplacer avec des béquilles.
En janvier 1932, son journal Forces lance un supplément : "Le Secret des dieux", qui prétend révéler tous les dessous de la finance. Ce service financier est sur abonnement.
Le 8 avril suivant, elle révèle dans ce même journal tout le dossier concernant son affaire. Marthe Hanau est arrêtée le jour même. Elle est remise en liberté conditionnelle pour raison de santé le 25 octobre. Elle fait appel mais sa demande est rejetée, elle réussit cependant à retarder la procédure de jugement.
Elle est finalement incarcérée le 22 février 1935 à la prison de Fresnes.
Elle se suicide le 14 juillet 1935, à l'infirmerie de la prison de Fresnes, à l'aide d'un tube de barbituriques. Après cinq jours d'agonie, elle est déclarée officiellement morte le 19 juillet 1935 à 6 h 20 du matin par l'administration pénitentiaire.
Le 29 juillet, elle est inhumée dans un caveau provisoire du cimetière Sud (Montparnasse). Le temps de construire sa sépulture au cimetière parisien de Bagneux, son corps y est transféré le 3 janvier 1936.
Commentaires
Enregistrer un commentaire